Bobby Fisher vit à Pasadena

Lars Norén, dramaturge suédois contemporain, est passé maître du thriller familial, de l’explosion à retardement. Il décortique les rapports familiaux à travers des personnages perpétuellement à la limite de la fracture, en sursis. Il y a le père, la mère, le fils et la fille. De retour d’une soirée au théâtre, tous se retrouvent autour d’un verre. Chacun s’adonne à une conversation apparemment sans conséquence. Dans une nuit qui dure, chacun tente de dire maladroitement, violemment, les endroits où l’amour a manqué… jusqu’au petit matin. Les spectateurs, installés dans un salon, au plus près de ce qui se joue, suivent le déplacement des pions. Pour Lars Norén, la famille est cet échiquier rigide où les pièces s’affrontent, mais sans espoir de vaincre, comme par habitude. Quatre comédiens magnifiques portent ce texte fluide avec une juste intériorité et font entendre toutes les craquelures qui menacent le vernis social et familial. Tout est dosé, progressif, ralenti, accéléré, comme une navigation sur un bateau ivre.